C'est l'histoire d'une entreprise installée dans le village d'Hamois, entre Namur et Ciney. Macors, c'est Gérard Sevrin, mais aussi 67 travailleurs indissociables d'un projet de vie.
Isabelle Morgante
L'entreprise Macors est spécialisée dans la construction et la transformation/rénovation. Son core business, ce n'est pas le quartier résidentiel de maisons champignons ou la construction à tout va. Avec ses 67 collaborateurs, Macors prend justement le contre-pied de cette tendance immobilière. Le souci du détail, la recherche de l'excellence au service d'une clientèle parfois exigeante, c'est le leitmotiv du premier de cordée Gérard Sevrin.
Le berceau de la famille Sevrin, c'est le village de Haversin (Ciney). Le papa est percepteur des postes, la maman élève les deux filles et trois garçons du couple. "J'ignore comment mes parents ont fait mais nous n'avons jamais manqué de rien et avons tous effectué des études. Ils nous ont donné de belles valeurs que j'applique au sein de l'entreprise. Ils sont nos références et leur trace transparaît dans la fratrie", déclare aujourd'hui Gérard Sevrin (58 ans). L'entrepreneur est ingénieur de formation. Après des études de dessin en construction, il décroche une licence en ingénierie à Liège. "J'y ai découvert ce que je voulais faire de ma vie. Nous avions des professeurs motivants, qui nous aidaient à progresser. C'est ainsi que j'ai complété mon parcours d'un cursus en gestion. Lorsque j'ai présenté mon mémoire d'ingénieur, l'un des membres du jury était William Wauters (anciennement président du groupe Terre, NDLR). Il m'a ouvert l'esprit à plein de choses." De fil en aiguille, le stage ouvre la voie à un premier contrat, nous sommes au milieu des années 80. "Instantanément, j'ai mis la main à la pâte en chapeautant les cellules de reconversion mises sur pied suite aux gros licenciements dans le bassin du Borinage. J'avais en face de moi des gars parfois aigris par la situation, qu'il a fallu apprivoiser, avec lesquels nous sommes parvenus à faire de belles choses."
Être constructif et avancer
Cette prise en charge de l'humain, avec ses forces et ses défauts, c'est aujourd'hui encore le quotidien de l'entrepreneur. "Le trésor de la PME Macors, ce sont les gens qui la composent. Tous sont là parce qu'ils adhèrent aux valeurs de l'entreprise et diffusent notre ADN dans nos réalisations. Chaque chantier est un prototype, on a besoin que nos collaborateurs y mettent du cœur et de l'âme."
Et puis un jour, coup de pouce de la vie ou signe du hasard, Gérard Sevrin rencontre l'entrepreneur Claude Macors sur un chantier bruxellois. Ce dernier est à la tête de l'entreprise éponyme, créée en 1981. Le premier contact n'est pas des plus positifs mais les deux hommes parviennent à s'entendre et à tirer le meilleur d'eux-mêmes pour le bien de leur entreprise respective. Au point que Gérard Sevrin fera appel plus tard à Claude Macors pour l'un de ses derniers chantiers Terre. Ce contact établi, Gérard Sevrin rejoint l'entreprise Macors en 1988, pour y devenir gestionnaire de chantier.
"À cette époque, nous étions une dizaine à travailler, Claude Macors m'a laissé les coudées franches, j'ai appris le métier sur le tas et ai toujours pris des décisions comme si l'entreprise était la mienne. C'est probablement cette grande confiance accordée par Claude Macors qui a forgé le chef d'entreprise que je suis devenu. Je n'aime pas tergiverser. À un moment donné, il faut arrêter de se poser des questions. C'est oui ou c'est non, mais on avance", résume l'entrepreneur.
Une devise de travail mise en pratique lorsque l'opportunité de reprendre Macors se présente. "J'ai d'abord fait le tour du personnel – soit 45 personnes en 2007 – et ai demandé l'assentiment de tout le monde. L'avis positif fut unanime. On “chipotait” depuis deux ans, c'était contreproductif. J'ai donc fait appel à un consultant extérieur, un ancien de Macors, qui allait pouvoir nous faire bénéficier d'une vision globale. En prenant de la hauteur, il a établi une convention en quinze jours. Fin 2007, je reprenais l'entreprise."
Aujourd'hui, l'emploi est en pleine expansion. Macors compte 67 salariés, le taux de départ est très faible, certains sont là depuis 1981.
Soixante-cinq hommes et deux femmes, dont une future maman. "Tenant compte de son profil et de ses compétences, nous avons fait le choix de l'engager tout en sachant qu'elle attendait un bébé pour mai prochain. C'est une vraie question pour l'organisation de vie dans une PME et nous n'avons pas de solution miracle. Nous allons devoir gérer cela le moment venu. De manière générale, si j'engage, c'est pour donner un vrai travail dans le long terme, ce n'est certainement pas pour mettre la personne dehors quelques mois plus tard. Ce n'est pas non plus pour pallier un creux temporaire de main-d'œuvre. Nous ne faisons jamais appel à de l'intérim car nous voulons que nos gars portent l'ADN de l'entreprise sur les chantiers, tout en se dirigeant vers des solutions apaisantes et prospères pour tout le monde."
Dans le même ordre d'idées, Gérard Sevrin refuse catégoriquement d'engager de la main-d'œuvre étrangère à bas coût socialement non équivalente à la main-d'œuvre belge. "Nous avons fait un choix stratégique qui nous ferme les portes des marchés publics. Pour les décrocher, il faut présenter un prix qui entre dans les cordes et que l'on boucle grâce (entre autres) à une main-d'œuvre moins chère. C'est clairement le poste qui nous met hors compétition, mais c'est un choix que j'assume." Ayant acquis la confiance de nombreux clients pour lesquels il travaille régulièrement, l'entrepreneur dit vouloir préserver l'excellence du travail de ses équipes qu'il connaît parfaitement.
Des équipes qui d'ailleurs n'ont jamais connu le processus d'élections sociales au sein de la PME namuroise ainsi que dans le secteur de la construction. "À ce sujet, si on a un problème, on en parle et on propose une solution dans le respect et le bien-être de chacun. Le cadre syndicaliste doit être en phase avec l'évolution de notre temps ! Soyons constructifs, travaillons ensemble, et donnons au syndicat l'unique rôle de cadre pour, ensemble, faire avancer la machine et notre secteur."
En pénurie ?
Tout qui s'informe et a lu attentivement UCM Magazine ces dernières semaines sait que le secteur de la construction, dans son aspect le plus large, souffre d'une pénurie inquiétante. L'éternel débat est sur la table : comment séduire la nouvelle génération et la garder, tout en considérant que celle-ci a besoin d'un apprentissage et/ou d'une formation ? "Former un jeune est énergivore et chronophage mais cela nous permet de l'amener à nos valeurs. Les écoles apprennent à apprendre les matières de base essentielles et nécessaires, sans avoir peur de l'exigence. Nous, entreprise, nous devons être là pour transmettre et apprendre nos métiers sur le terrain. École et entreprise doivent travailler main dans la main car nos métiers évoluent très vite. Par ailleurs et d'un point de vue caricatural, un maçon qui ne sait pas lire une fiche technique ou un menuisier qui ne sait pas réaliser une programmation DAO n'est pas le candidat idéal. Les métiers de la construction auront toujours besoin de pousseurs de brouettes mais aussi de gens spécialisés dans les métiers où la technologie devient de plus en plus présente C'est pour cela que participer à des compétitions comme EuroSkills ou WorldSkills est bénéfique et fédérateur pour le candidat et l'entreprise. Clairement, cela fait grandir et donne une image positive mais cela nous met aussi devant un grand défi : celui de garder ces jeunes et de les fidéliser, leur rapport au travail étant différent des générations précédentes."
Communication et respect sont des valeurs que Gérard Sevrin prône. Il est fier de son équipe, dont la photo et les prénoms accueillent les visiteurs dans le hall de l'entreprise à Hamois.
L'actualité de Macors, c'est la construction d'un ensemble de 18 logements intergénérationnels, d'un commerce et d'une crèche juste en face des bureaux de la chaussée de Liège.
Les nouveaux espaces partagés de travail chez Macors : tous les meubles ont été fabriqués par les menuisiers de l'entreprise. Une démarche valorisante des compétences internes.
L'une des fiertés de Gérard Sevrin : un ensemble d'appartements en région bruxelloise, truffé de prouesses architecturales qui ont, une fois de plus, poussé les équipes à se dépasser.
L’entreprise Brunet, à Mariembourg, travaille le bois depuis plusieurs générations. Au point de se positionner aujourd’hui comme une référence dans son secteur. Ce qui lui permet de tirer son épingle du jeu à l’heure où de nombreuses sociétés spécialisées dans la construction tirent la langue.
Auréolée de ce brillant titre il y a quelques semaines, la jardinerie Tournesols, à Cognelée, s’impose définitivement comme la fine fleur dans ce champ vaste que sont les commerces horticoles. Sortie de terre il y a une grosse année, l’entité namuroise marque aussi par ses investissements pour un modèle plus vert. Logique, finalement…