Immobilier d'entreprise : la hausse des taux freine la rentabilité

Le nombre de crédits hypothécaires demandés et octroyés par les banques a fortement baissé au troisième trimestre 2023 par rapport à la même période l'année précédente. D'après un rapport de l’Union professionnelle du crédit, cette chute serait de plus de 15,5 % pour les demandes et de 29 % pour les octrois. Plusieurs éléments expliquent cette baisse drastique : le prix des biens, les exigences PEB, mais surtout la hausse des taux d'intérêt qui avaient atteint un taux historiquement bas il y a quelques années.

Cela signifie-t-il qu'il n'est plus intéressant d'investir dans l'immobilier, surtout en tant qu'entreprise ? La réponse n'est pas si simple. Il convient déjà de séparer l'immobilier résidentiel et l'immobilier de bureau. "À part les taux qui sont plus élevés qu'il y a un an et demi, si l'entreprise a besoin de locaux, cela reste un bon plan. Je pars de l'hypothèse que l'entreprise a plus intérêt à être propriétaire de son outil de travail que locataire", note Michel Desprez, conseiller immobilier chez CBC. "Le coût de financement est quand même beaucoup plus élevé qu'il y a quelques mois", nuance son collègue Michaël Van der Elst. "Puis il ne faut pas oublier qu'acquérir des bureaux ou un entrepôt mobilise des fonds. Et, parfois, le développement de son activité rapporte une rentabilité supérieure. C'est un arbitrage que les financiers connaissent bien. Il est dans certains cas plus intéressant d'être locataire car développer son activité nécessite des fonds et cela peut être embêtant qu'ils soient bloqués par un achat". Au niveau de l'immobilier résidentiel, la hausse des taux cumulée au prix des matériaux a mis un gros coup de frein à de nombreux projets. "C'est un investissement beaucoup moins intéressant qu'il y a quelques mois. L'entreprise qui investit dans le résidentiel le fait vraiment dans un but de rendement, pas dans le but d'avoir ses propres outils et, là, effectivement, l'accroissement des taux pénalise réellement", explique Michel Desprez.

L'importance du PEB

À l'heure où l'on parle de plus en plus de responsabilité sociétale des entreprises, les banques sont davantage prêtes à financer certains projets plutôt que d'autres. "Ce n'est pas un critère formel dans le sens où il n'y a pas une grille qui dit que si le bâtiment n'est pas RSE, on applique tel niveau de marge et tel autre niveau s'il est RSE. Mais, dans la réflexion de tous les jours des commerciaux, des analystes et des décideurs, oui ça intervient. On aura d'autant plus envie de faire une offre performante en termes de financement si le bâtiment est très bien". À l'inverse, un financement pour un bureau ou une habitation qui se révèlerait être une véritable passoire énergétique pourrait être refusé. "C'est déjà arrivé. Si, au niveau du plan d'acquisition, il n'y a pas des travaux qui sont prévus pour améliorer le PEB, on ne va pas effectuer cette opération", complète Michaël Van der Elst.

Dans les derniers baromètres PME organisés tous les trimestres auprès de nos membres, les entrepreneurs se plaignaient que l'accès au crédit était de plus en plus compliqué. Ce que réfute le secteur bancaire. "Je ne crois pas que ce soit plus difficile aujourd'hui qu'hier. Nos critères n'ont pas changé à ma connaissance alors qu'ils auraient pu être modifiés à cause des différentes crises qu'on a traversées. Ces critères ont, par contre, pu provoquer la détérioration de la qualité de la structure financière de certaines entreprises. Ce n'est pas la banque qui est plus frileuse à octroyer des crédits, mais on doit évidemment lier les crédits à un certain nombre de garde-fous. Je peux comprendre que certains ont le sentiment d'avoir plus dur à emprunter. Mais ce n'est pas parce que la banque a changé, c'est parce que leur solidité financière n'est plus la même", détaille Michel Desprez. "Les critères de la banque n'ont pas évolué, contrairement au marché des taux. Et ce marché n'est pas excessif aujourd'hui. Un financement sur 20 ans à du 4 %, ce n'est vraiment pas excessif. Ce qu'on a eu dans un passé proche, c'était incroyable et anormal", confirme Michaël Van der Elst.

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