Institut des Conseillers fiscaux et des Experts-comptables
Les membres de l'ITAA à la croisée des chemins

    Les professionnels du chiffre se préparent à relever de nombreux défis qui devraient changer le visage de leur métier en constante évolution.

    C'est en 2019 qu'est né l'ITAA, l’Institut des Conseillers fiscaux et des Experts-comptables. Il est le fruit de la fusion entre l’IEC (Institut des Experts-comptables et des Conseils fiscaux) et l’IPCF (Institut Professionnel des Comptables et Fiscalistes agréés). Ce projet, destiné à renforcer le poids de la profession dans le paysage économique belge, était dans les cartons depuis le début des années 2000. Aujourd’hui, l'institut compte près de 16.000 membres effectifs, dont 4.000 stagiaires, sans compter les 20.000 salariés qui exercent la profession via des cabinets agréés. Ces derniers travaillent directement ou indirectement pour plus d’un million d’entreprises et d'indépendants belges dont la plus grande partie sont des PME.

    Certaines entreprises rechignent à mettre la main au portefeuille quand il faut faire appel aux services d'un expert-comptable. Ils sont pourtant particulièrement utiles au quotidien, et pas seulement pour remplir sa déclaration d'impôt ou de TVA. "On se focalise désormais davantage sur l'accompagnement de l'entrepreneur dans son business. Cela peut bien sûr se faire à partir de données chiffrées. On est par exemple là pour réfléchir aux investissements à réaliser, analyser des études de marché avant de lancer certains produits, (re)structurer des sociétés, faciliter leur passage au numérique, céder ou acquérir des entreprises… Nos services sont nombreux. On n'est pas juste là pour les obligations légales. J'ai envie d'inviter les entrepreneurs à nous consulter. Ils ne doivent pas nous voir comme celui qui va les aider à frauder. Ils doivent nous voir comme un accompagnateur en vue de l'épanouissement de leur business, un partenaire pour les faire exceller, la fiscalité étant accessoire puisqu'il faut d'abord réaliser des bénéfices pour générer des liquidités avant de payer des impôts. Cela ne nous empêche naturellement pas de rechercher la voie la moins imposée", note Vincent Delvaux, vice-président de l'ITAA.

    Vincent Delvaux, vice-président de l'ITAA.

    Vincent Delvaux, vice-président de l'ITAA.

    L'Institut travaille par ailleurs à faciliter la vie quotidienne des patrons. Un sujet qui l’occupe particulièrement pour l'instant : la facturation électronique en B to B. Plusieurs pays européens ont déjà franchi le pas en mettant en place un système numérique permettant l'envoi et la réception sécurisés de factures. Le but annoncé est de lutter contre les fraudes et d'augmenter les recettes fiscales. L'entrée en vigueur d'un tel système en Belgique a été annoncée fin septembre pour le 1er janvier 2026. "On a actuellement un tas de fournisseurs qui transmettent des factures. Elles ne sont pas forcément au format électronique, parfois ce sont de simples PDF… Et pour l'instant il faut réceptionner ces factures aux différents endroits où elles se trouvent, ce qui peut être compliqué pour nous", explique Vincent Delvaux. Plus globalement, c'est la question de la digitalisation du métier qui est au cœur des préoccupations de l'ITAA. Cyberattaques, plateformes numériques homogénéisées, gain de temps grâce à l'intelligence artificielle… Toutes ces questions doivent être intégrées petit à petit par les experts-comptables et conseillers fiscaux, dont le travail est amené à évoluer. Face à ces défis, l'ITAA a décidé de prendre les devants en réfléchissant à la création d'outils informatiques pertinents afin que cette transition s'effectue en douceur. La thématique de l'intelligence artificielle sera d’ailleurs abordée lors du congrès annuel qui se tiendra les 9 et 10 novembre 2023. "L'aspect humain restera essentiel, notamment pour la réflexion ou le contact client, mais nos tâches mécaniques seront encore plus automatisées. Je suis convaincu que l'intelligence artificielle va faire évoluer notre métier. Mais cela ne signifie pas qu'il disparaîtra demain. Il prendra juste une nouvelle forme, comme il le fait depuis des siècles".

    L'Institut se montre également vigilant par rapport à la crise d'attractivité que connaît actuellement la profession. L'image de l'expert-comptable assis derrière son bureau toute la journée demeure ancrée dans les esprits. Ajoutez à cela que plusieurs cabinets refusent d'instaurer le télétravail et sont en retard en matière de numérisation (alors qu’une politique en la matière est assez simple à mettre en place), et l'on comprend vite pourquoi les cabinets ont de plus en plus de mal à recruter des jeunes motivés. "On n'est pourtant pas dans un travail routinier. Le job est très humain. On rencontre différentes personnes issues de tous les milieux. On collabore avec des petites, des moyennes, des grandes entreprises, d’autres professions complémentaires pour certaines missions… C'est une vraie richesse ! Personnellement, je ne conçois plus le métier tout seul. L'expert-comptable généraliste de l'époque n'existe plus. Il faut véritablement se spécialiser aujourd'hui et ça nous amène à travailler à plusieurs sur un dossier. C'est donc aussi enrichissant sur le plan humain. On doit arriver à le montrer aux plus jeunes maintenant", conclut-il.