L'Antwerp World Diamond Centre, membre UCM
Le diamant brille toujours à l'exportation

© New Africa/AdobeStock

La position d'Anvers sur le marché mondial du diamant est bien connue. Toutefois d'autres villes, comme Surat en Inde, Ramat Gan en Israël ou Dubaï aux Émirats, rêvent de lui ravir sa place. L'organisation AWDC tente de l'éviter.

Jean-Christophe de Wasseige

Dans la métropole, au sortir de l'auguste gare, s'étend sur la gauche un quartier aux immeubles anciens mais parfaitement rénovés. En s'y enfonçant, on gagne vite le "Diamond Square Mile", un étroit piétonnier constitué de trois rues dessinant un "s" et sécurisé par des barrières et des caméras : les Rijfstraat, Hoveniersstraat et Schupstraat. C'est ici que bat le cœur diamantaire anversois.

Au sein de hauts immeubles se cachent une myriade d'ateliers, où les pierres sont réceptionnées des quatre coins du monde, taillées, polies, négociées, revendues. Toute cette ruche compte quelque 1.600 entreprises et 6.000 employés. La tradition diamantaire d'Anvers jouit d'une renommée mondiale. Cependant, la concurrence devient féroce. Une partie de l'activité de taille et du polissage a déjà migré à Surat en Inde ou à Ramat Gan en Israël. Dubaï ambitionne de s'imposer. Quant à la Chine et aux USA, ils se sont lancés dans les diamants de synthèse.

Anvers, elle, préserve deux spécialités : le négoce des pierres brutes et la taille des diamants les plus précieux. Environ 86 % des diamants bruts et 50 % des diamants polis continuent de passer par le Square Mile. Cela pèse lourd : environ 4 % de l'ensemble des exportations belges dans le monde, soit 16,1 milliards d'euros en 2019 (dernière année avant la pandémie). Les exportations des seuls diamants polis se sont élevées à 8,7 milliards d'euros. Principaux marchés : USA, Hong Kong et Suisse.

Au milieu de la Hoveniersstraat, trône le bâtiment de l'Antwerp World Diamond Centre, qui défend les intérêts du secteur : négociants, tailleurs, certificateurs, joailliers… La mission de l'AWDC est double : renforcer la position d'Anvers comme plaque tournante du commerce et promouvoir l'image du diamant auprès du grand public. L'organisation assure aussi des rôles opérationnels. Elle coordonne ainsi la sécurité dans le district et, surtout, abrite le Diamond Office, par lequel toutes les importations et les exportations doivent se faire. Ce bureau est géré avec le SPF Économie et les Douanes. On y vérifie l'origine des pierres selon le "processus de Kimberley", qui vise à interdire les diamants des régions en guerre ; on y examine leur valeur ; on y délivre les autorisations.

Deux grands enjeux

Wim Soons, responsable des affaires publiques de l'AWDC.
© AWDC

"À l'heure actuelle, l'AWDC a deux préoccupations majeures, explique Wim Soons, le responsable des affaires publiques. La première est de s'assurer que nos membres puissent, de façon aisée, ouvrir des comptes bancaires et décrocher des crédits." Depuis la crise financière de 2008, c'est devenu plus difficile. Il faut prouver son identité et son honorabilité. L'instauration d'un "service bancaire de base" pour les entreprises pourrait améliorer la situation (un tel dispositif existe pour les particuliers depuis 2003). "Une loi a été votée au Parlement en novembre 2020 mais n'est toujours pas d'application. Nous espérons qu'elle entrera bientôt en vigueur."

La seconde préoccupation concerne l'attractivité d'Anvers. "Face à la concurrence, il est crucial de bénéficier d'un climat fiscal stable. Nous voulons qu'il demeure tel qu'il est aujourd'hui. D'abord parce que, avec la “taxe carat”, il rapporte davantage à l'État (NDLR : instaurée en 2017, cette taxation fixe la base imposable des grossistes en diamant via un pourcentage de leur chiffre d'affaires). Ensuite, parce que nos compagnies ont besoin de prévisibilité."

L'AWDC a pour directeur général Ari Epstein.
© AWDC

"Le plus grand atout d'Anvers, c'est sa masse critique : son importante concentration d'entreprises du diamant. Si celles-ci se délocalisent, elles ne reviendront pas. Donc, il faut tout faire pour les garder. Notre second atout, c'est la conformité aux règles. Nous investissons beaucoup dans la prévention et les mesures anti-blanchiment. Peut-être plus que d'autres places dans le monde. Cela donne l'assurance aux opérateurs que, s'ils veulent venir travailler ou commercer chez nous, tout sera OK."

Dernier défi : "digérer" la pandémie. Le secteur a, lui aussi, été secoué : mines à l'arrêt, transports bloqués, négociants incapables de se déplacer pour examiner les pierres… Un rebond a toutefois été amorcé. La crise Covid a aussi accéléré certaines évolutions. Comme le fait que les acheteurs préfèrent découvrir les bijoux sur internet avant de se rendre dans une joaillerie. Les diamants sont éternels… mais pas la manière de les vendre.

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