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La bastide, un p'tit truc en plus

12/06/24

La Bastide asbl est un centre d’hébergement et un centre de jour basé à Woluwe-Saint-Lambert reconnu par la CoCof. Il regroupe des personnes ayant à la fois besoin d’un lieu de vie et d’un accompagnement psychosocial au quotidien.

"O sooleee miiiiiioooo" habille de ses notes chaudes l’espace de vie, y sédimente instantanément cette légèreté communicative alors que deux résidents dansent tendrement. Rappelle, aussi, au printemps que la case lumière est bien dans la grille de ses prérogatives après des semaines écrites dans le gris tristoune des averses. "Ils sont très sensibles à cela, à la météo, au soleil", glisse Marc Minnen, l’un des deux directeurs de La Bastide. Alias "Dalida" dans les karaokés et selon certains résidents, pour sa capacité à transcender "Il venait d’avoir 18 ans", démonstration spontanée à l’appui, lors desdites soirées musicales organisées par le centre.

Mèches sel qui fanfaronnent, petites lunettes ovales et moustache dessinent ce personnage au look de savant jovial, à la tête du centre qui existe dans sa version hébergement depuis 1978. "Mais je n’y suis que depuis 2015", sourit ce psychologue de formation, métier qu’il exerce du reste, dispensant en outre des cours dans cette matière. "Aujourd’hui, et depuis vingt ans, c’est à la fois un centre d’hébergement et un centre de jour. Nous avons vingt résidents et, pour la partie jour, seize dont la moitié vient de l’extérieur. Ce sont des personnes pour lesquelles le double diagnostique peut être posé. C’est-à-dire une déficience intellectuelle légère à modérée et, par ailleurs, un trouble psychiatrique associé. Mais il y en a qui sont beaucoup plus intelligents que nous. Nous en avons un qui, par exemple, est "chronologue" et qui, en vous demandant votre date d’anniversaire, pourra vous dire quel jour elle tombera l’année prochaine. Je lui ai demandé s’il y avait un truc, il m’a regardé avec un regard sibyllin… Je ne les aborde pas sous l’angle de "j’ai affaire à quelqu’un qui ne comprend pas bien car il a une déficience". Plutôt comme quelqu’un qui a une difficulté dans le lien, dans le contact humain."

Kadi et Mariam occupées à préparer le repas.

Kadi et Mariam occupées à préparer le repas.

Le lien, le contact, le liant qui écrit la beauté de l’humain s’érige en ligne directrice de la Bastide. Jusqu’à son positionnement géographique à Woluwe-Saint-Lambert, au coeur même d’un quartier universitaire de l’UCLouvain. Kots, familles et résidents s’y côtoient d’ailleurs. "Oui, nous sommes dans un cadre de vie estudiantin. C’était l’idée dès le départ, que la maison ne soit pas stigmatisée, qu’elle n’ait rien de particulier, s’inscrive dans le même fil architectural que les kots qui l’entourent", poursuit-il. Hormis les quatre oeuvres colorées sur la façade, difficile, en effet, de différencier l’établissement du reste du dédale universitaire qui s’étire dans son architecture si typique. "L’idée était vraiment que les résidents puissent se mélanger avec les étudiants. On travaille d’ailleurs en partenariat avec un kot à projets, "Papyrus". Ils viennent tous les quinze jours organiser une activité avec nos résidents. Parfois c’est un souper spaghetti dans leur kot, parfois un tour sur le marché de Noël, ou un bowling. Chaque fois une activité différente. C’est vraiment très chouette car ça permet de garder le contact. Et dans leurs mouvements sur le site, forcément, ils sont en contact avec les commerçants, les familles, les étudiants. Il y a une vraie interaction."

Une halte, pas un terminus

Reconnu et subsidié par la CoCof, la Commission communautaire française, le Centre est un lieu de vie où le résident est "abordé comme sujet supposé capable d’être acteur de son existence grâce à l’encadrement institutionnel." Comment ? En l’impliquant, en lui apportant les "repères nécessaires pour le rendre le plus libre possible des choix qu’il peut être amené à faire dans la vie de tous les jours". D’où la notion, centrale, de filet thérapeutique. "C’est l’idée que la plupart n’ont plus beaucoup de réseau et d’entourage", pose Marc Minen, alors que la discussion se poursuit sur un petit banc niché dans la verdure qui garnit le piétonnier. "La Bastide n’est pas la gare terminus, plutôt une halte. Ils sont de passage et même s’il n’y a pas de limite au temps de séjour, ça reste un temps de passage et donc, on fait en sorte qu’ils puissent se constituer ou se reconstituer un réseau de référents extérieurs pour continuer à en bénéficier une fois qu’ils ne sont plus dans les murs."

La halte peut théoriquement épouser la brièveté d’un souffle comme elle peut s’écrire dans la durée, à en tourner les pages du calendrier. Voire en changer. "Une fois qu’on y rentre, on y reste le temps qu’on y veut sauf s’il y a, évidemment, de gros soucis avec les autres. Le plus ancien de nos résidents est entré en 1979. Il avait vingt ans à l’époque. Pour certains, ce qui fait que le séjour ne peut pas se poursuivre, ce sont par exemple des difficultés de mobilité. Il y en a qui disent 'je reste ici tant que je peux'."

Pas de quoi, pour autant, malmener la notion de temps dans une liste d’attente interminable. "Ce serait contre-productif. Ça s’autorégule", assure le directeur qui, c’est indéniable, respire cette notion de partage. Il y a, comme ça, des choses qui ne s’expliquent pas. Qui peinent à trouver leur rationalité dans la définition. Plutôt des ressentis, des sensations. "Je ne saurais pas faire autre chose", confie-t-il tout de suite. "On dirait qu’on est là pour leur apprendre des choses mais je pense qu’on a autant de choses à apprendre d’eux. Ils ne sont absolument pas sans ressources. Ils ont, dans certaines situations, des trouvailles auxquelles on n’aurait pas pensé. C’est un enseignement mutuel, d’une certaine manière. Et je trouve ça très riche. Le contact humain, c’est une chose indispensable pour exercer mon métier. Si on n’a pas le sens du contact humain, il veut mieux travailler dans les archives au fond d’une cave, on y est embêté par personne. Ici, c’est vraiment indispensable d’avoir l’intérêt pour l’autre et de s’en nourrir. Pas d’une manière vampirique mais de s’appuyer sur ce contact pour pouvoir travailler avec les gens qui sont ici, de pouvoir les aider à surmonter leurs difficultés au quotidien et dieu sait si elles sont nombreuses."

« Un petit bricolage »

Ces interactions, elles peuvent se tisser lors d’activités comme dans le partage du quotidien, des gestes qui sous une banalité crasse tiennent d’une évidente importance. "On mange avec eux, on fait la vaisselle, on nettoie leur linge,… Tout ça, ce sont des gestes de la vie quotidienne mais c’est aussi ce qui sert de point d’appui pour dialoguer plutôt que de les recevoir dans un bureau pour un entretien très formel. Il y en a beaucoup qui ont la hantise de rentrer dans un bureau car ils se demandent ce qui va leur arriver. On discute avec eux en faisant la vaisselle, en fumant une clope ou dans le cadre d’un atelier, en travaillant la terre par exemple. C’est souvent une modalité beaucoup plus souple pour entrer en relation avec eux, qu’ils puissent se confier. Après, c’est un travail au cas par cas, il y en a qui sont très méfiants, qui en disent le moins possible, et on respecte évidemment ça."

Activités type artistiques, comme de la céramique, de la peinture, du dessin… ou plus sportives avec des raquettes et du badminton, du tennis ou du ping-pong, les moments sont multiples et, surtout, pas obligatoires. Sorties culturelles, balade, ciné-club, musique,… "C’est varié même si, au niveau de l’horaire, c’est toujours les mêmes jours. Il y a une récurrence. Cette systématisation est importante pour nos résidents et nos usagers car elle amène une certaine série de repères sur la semaine."

Des indicateurs, des moments définis, des respirations qui nourrissent l’envie, l’espoir, que la suite puisse, peut-être, s’écrire autrement. "Oui, c’est exactement cela", sourit le psychologue en sortant une cigarette. "Qu’ils puissent s’appuyer, exporter les solutions une fois qu’ils repartent, qu’ils emportent le petit bricolage qu’ils ont découvert à l’occasion de leur séjour. Ils ont un peu de difficultés à comprendre le monde actuel. Il y en a par exemple qui ne comprennent pas les machines qui distribuent les billets, on doit leur servir d’interprète pour leur dire ce que veut la machine ou l’employé qui se trouve à l’administration communale. Ce sont surtout des gens qui sont en difficulté avec le lien. Ils ont une grande difficulté à vivre seul. C’est vraiment compliqué mais en même temps vivre avec d’autres, c’est aussi compliqué. Donc c’est le point de jonction entre ces deux difficultés autour de laquelle on essaye d’organiser le séjour. C’est pour ça qu’on organise beaucoup d’activités collectives. C’est comme si on s’appuyait sur le collectif pour créer le lien avec chacun."

Ce "petit bricolage" comme l’explique poétiquement Marc Minnen, peut leur permettre de "réintégrer peu ou prou le circuit dit normal. Avec des guillemets car il fait évidemment s’entendre sur ce que sont les gens normaux. L’idée, c’est qu’ils puissent poursuivre leur vie ailleurs, dans un encadrement un peu allégé, dans des appartements supervisés par exemple", conclut-il alors que, doucement, l’heure appelle le repas. Dans les cuisines, Kadi et Mariam s’activent. Après Luciano Pavarotti, la voix de Frédéric François enquille. "Ahh des classiques... Chaque vendredi, on y a droit", sourit le directeur.

Notre accompagnement

Secrétariat social 

La Bastide asbl a rejoint UCM en 2004, à la création de la déclinaison jour du centre. "Plus de travailleurs ont rejoint l’institution et c’est pour cette raison que nous avons rejoint UCM", explique Marc Minnen. Du fait qu’on a le centre de jour et le centre d’hébergement, on a certains travailleurs qui peuvent avoir six contrats de travail puisqu’ils ont la caquette d’éducateur pour une partie, de psychologue pour une autre et d’éducateur chef de groupe pour une troisième. Ça complique beaucoup de chose au niveau de la gestion du personnel. On a dû faire appel à un secrétariat social qui est à la hauteur. Nous avons trente-et-une personnes qui travaillent dans le centre mais pas toujours des horaires complets. Cette multiplication de casquettes démultiplie le travail. Nous avons au moins une fois par semaine des contacts avec UCM. Je recommande UCM car ils ont énormément d’outils digitaux comme appipay qui nous évitent la paperasserie."

La Bastide a également fait appel à l’expertise d’UCM pour réaliser son règlement de travail. "En fait, on s’est rendu compte que le notre datait de…1981. Il était donc tout à fait dépassé. On est passé de six à une cinquantaine de pages. Pour nous aider à le réaliser, on a fait appel à un juriste d’UCM. On a fait ça en partenariat avec les travailleurs et on a pu réaliser un règlement sur mesure grâce au partenariat avec UCM. C’est indispensable d’avoir un secrétariat social un peu à la hauteur. C’est une précieuse ressource. Sans cela, on irait dans le mur assez vite par rapport aux exigences actuelles."

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