Raté ! La pension à points, plus juste et plus sûre, est renvoyée aux calendes grecques. Néanmoins, les règles ont beaucoup évolué depuis 2014. Pour les indépendants, une chose n'a pas changé : mieux vaut se constituer une pension complémentaire.
Thierry Evens
La Commission pensions, formée d'experts et chargée d'insuffler une vision claire dans les réformes structurelles des retraites, peut être déçue. Le calcul par points, qu'elle avait préconisé et que le gouvernement avait choisi pour pérenniser le système, n'est pas mis en place et ne le sera pas sous cette législature. Trop tard, trop compliqué, trop dangereux surtout à l'approche des élections, quand les syndicats et les partis d'opposition tirent à boulets rouges sur le projet en utilisant massivement la désinformation.
Pour l'UCM, l'échec de la pension à points est regrettable. Ce mode de calcul répondait aux deux soucis majeurs exprimés par les indépendants : 82 % jugent les montants alloués aux retraités insuffisants et 61,3 % craignent que l'État ne puisse pas assumer ses obligations. La réforme aurait rendu le système pérenne, mais aussi plus transparent et plus équitable. Le point de pension, lié au travail effectif et au montant des cotisations sociales payées, permet de connaître à tout moment ses droits et balaie tous les systèmes préférentiels, les assimilations, avantages et statuts privilégiés accordés à certaines catégories de la population. Les syndicats ont défendu un statu quo favorable à leurs affiliés.
La révolution n'aura pas lieu, mais le système a néanmoins été diantrement réformé par le ministre Daniel Bacquelaine (MR) et le gouvernement fédéral. Côté fonctionnaires, les régimes très favorables (enseignants, policiers, cheminots...) le sont un peu moins. Pour les salariés, l'assimilation des années non travaillées est moins généreuse et surtout, les prépensions à 52 ou 55 ans, c'est terminé. Ce sera au plus tôt 59 ans l'an prochain et 60 ans en 2020. Les conditions d'accès à la pension anticipée – et cela vaut pour les indépendants aussi – ont été revues à la hausse. La règle de base est qu'il faudra, dès 2019, une carrière de 42 ans pour partir à la retraite à 63 ans, au lieu de 35 années de carrière pour un départ à 60 ans naguère. Dès l'an prochain, il sera possible d'augmenter sa pension en travaillant pendant plus de 45 ans.
L'effet positif de ces mesures sur le marché du travail est bien visible. L'âge moyen du départ à la retraite des salariés est remonté de 59,6 ans en 2014 à 60,5 ans. L'augmentation du taux d'activité des aînés a un effet d'entraînement qui réduit le chômage des jeunes. Et la sécurité sociale s'en porte beaucoup mieux, avec des recettes en plus et des dépenses en moins. L'allongement des carrières permet une hausse des pensions. En quatre ans, le montant minimum a augmenté de 95 euros pour les salariés et 160 euros pour les indépendants, l'égalité étant à présent réalisée.
Le travail continue
L'âge pivot de la retraite sera porté de 65 à 66 ans en 2025 et 67 ans en 2030. Cela rend d'autant plus nécessaire l'aboutissement du débat sur la pénibilité des métiers. Il faut garder des possibilités de départ anticipé pour les personnes qui exercent des activités très éprouvantes. Un accord est intervenu dans la fonction publique. Pour les salariés, la négociation bat son plein au Conseil national du travail (CNT) entre les représentants des employeurs (FEB, UCM, Unizo) et les syndicats. Les positions sont difficiles à concilier. Côté patronal, la ligne est de se baser sur des éléments objectifs (travail de nuit, à risques...) et d'éviter de créer une usine à gaz. Il faut un système quasi automatique qui n'impose pas aux patrons de PME un délicat recensement annuel des fonctions pénibles.
Pour les indépendants, la discussion a lieu au Comité de gestion du statut social. Il s'oriente vers un système individualisé. Au cas par cas, un indépendant approchant de sa fin de carrière pourrait faire reconnaître par un médecin une usure et des problèmes de santé liés à son activité.
Un euro pour les salariés, 66 centimes pour les indépendants
La pension des indépendants est calculée de la même façon que celle d'un salarié. À un détail près. Un coefficient de 0,66 glissé dans l'opération. Son effet est brutal : quand un salarié se constitue un droit de pension de 100 euros par mois, l'indépendant est limité à 66 euros.
Pour l'UCM, cette "correction", imposée il y a plus de cinquante ans, n'a plus aucune raison d'être. Le prochain gouvernement, issu des élections du 26 mai 2019, devra abolir ce coefficient, quelle que soit sa composition et quel que soit le sort réservé au projet de calcul par points.
Comment calcule-t-on la pension d'un salarié ? L'objectif est que, pour une carrière de 45 ans, il touche une pension égale à 60 % de son salaire brut moyen. S'il gagne 30.000 euros brut par an, il doit recevoir 18.000 euros à sa retraite (1.500 euros par mois). Chaque année de carrière est valorisée à hauteur de 1/45 de 60 % du salaire brut de l'année. Dans notre exemple, ce "droit de pension" est de 400 euros par an après le départ en retraite.
Comment calcule-t-on la pension d'un indépendant ? De la même façon. Sauf que le résultat final de 400 euros est affecté du coefficient de 0,66. Le droit de pension n'est que de 264 euros. C'est ce qui explique que dans les faits, la plupart des indépendants ne touchent que le minimum des salariés, à savoir 1.212 euros par mois. Leur droit individuel est inférieur et ils sont donc "remontés" au minimum. Au mieux, un indépendant qui cotise pendant 45 ans au maximum aura une pension de quelque 1.580 euros, soit le maximum des salariés (2.400 euros) réduit par le coefficient de 0,66.
Dépassé par les faits
Il y a une justification historique à ce coefficient. Dans les années 60, la sécurité sociale dépendait entièrement des cotisations versées par les actifs, à savoir moins de 20 % pour les indépendants et près de 40 % pour les salariés en tenant compte de la partie versée par l'employeur. En 2018, la situation a changé. Les indépendants paient 20,5 %. Les cotisations personnelles des salariés sont plafonnées à 13,07 % et la part patronale est réduite dans de nombreux cas. L'État intervient massivement, avec l'argent de tous, pour financer la sécurité sociale.
Le service d'études de l'UCM a calculé le "retour sur investissement", en pension, d'un euro versé dans le statut social des indépendants et dans la Sécu des salariés. Celle-ci fournit des avantages supplémentaires : indemnisation du chômage, valorisation pour la pension des années non travaillées.
Dans le scénario le plus affiné, qui tient compte des carrières réelles et de l'espérance de vie, la conclusion est terrible. Chaque fois qu'un salarié investit un euro dans sa pension légale, il recevra 2,60 euros durant sa retraite. Pour un euro, un indépendant ne reçoit lui que 1,49 euro. Même la suppression du coefficient ne rétablirait pas une parfaite équité.
L'argent est là
La conclusion de cette étude UCM coule de source. Il faut au plus vite supprimer la réduction insensée du droit de pension des indépendants. À carrière égale et cotisations égales, il n'y a aucune justification à maintenir le "correctif" actuel.
Sauf peut-être le budget... Rendre les pensions des indépendants réellement proportionnelles va coûter de l'argent. En réalité, ce n'est pas un problème. L'argent, il est là ! La sécurité sociale des indépendants est en boni structurel de plus de 200 millions d'euros chaque année, au point qu'elle n'exerce pas la possibilité d'un droit de tirage de l'ordre de 300 millions supplémentaires. Elle dispose d'une réserve de quelque deux milliards d'euros. Cet argent vient des indépendants et doit revenir aux indépendants. Le risque existe que cette "cagnotte" ne serve un jour à éponger un déficit budgétaire quelconque. Elle doit servir à l'amélioration des montants de pension, demande numéro un des indépendants.
La PLC sociale reste prioritaire
Pour se garantir une pension confortable, le premier investissement qu'un indépendant a intérêt à faire est de souscrire à la pension libre complémentaire sociale (PLCS), dont l'UCM a l'exclusivité.
Par rapport à la PLC des groupes financiers (qui doivent rémunérer leurs actionnaires), la version sociale de l'UCM permet de cotiser davantage, avec un rendement également garanti et des frais de gestion réduits. La formule assure en plus une protection contre les aléas de la vie (assurance décès, invalidité, maladie grave, mais aussi faillite et maternité).
Très concrètement, la pension libre complémentaire ordinaire permet d'épargner 8,17 % de ses revenus. Le taux est fixé à 9,4 % pour la PLC sociale. Le taux d'intérêt garanti est identique et pour l'instant très bas : entre 0 et 1,5 % selon la formule choisie. Des participations bénéficiaires, non taxables, sont toujours possibles.
La version sociale de la PLC procure cinq avantages précis : une allocation mensuelle de 750 euros pendant six mois en cas de maladie grave, une rente mensuelle pendant douze mois en cas d'incapacité de travail de 1.000 euros maximum, la prise en charge des cotisations PLC pendant les périodes indemnisées (incapacité de travail, invalidité, maternité), une couverture décès améliorée (minimum de quinze fois la cotisation, majoration de 50 % en cas de mort accidentelle), 100 euros de prime de naissance. Enfin, selon les disponibilités, les rentes de retraite et de survie en cours peuvent être augmentées.
En savoir plus
Renseignements et offre personnalisée sans engagement :
Caisse d'assurances sociales UCM
081/32.07.25
[ cas@ucm.be }
Engagement de pension
Quand la PLC sociale est souscrite et les années d'études rachetées, les indépendants ont encore un autre outil pour améliorer leur pension.
L'engagement individuel de pension a longtemps été réservé aux mandataires de société. C'est une assurance de groupe, fiscalement déductible. La cotisation est calculée de façon à atteindre 80 % de ses revenus professionnels.
Depuis le 1er juillet de cette année, les indépendants en personne physique peuvent conclure des conventions de pension qui fonctionnent selon les mêmes principes que l'engagement individuel des gérants de société.
C'est une demande pressante de l'UCM qu'a rencontrée le gouvernement fédéral. Souscrire une convention permet de bénéficier de davantage de réductions d'impôts dans la constitution de son capital pension.
Rachat des années d'études
Les personnes qui suivent de longues études ont une carrière professionnelle écourtée. Quelqu'un qui sort de l'université à 23 ans ne peut pas avoir de pension complète puisqu'il ne peut travailler au mieux que 42 ans, et non 45, avant son 65e anniversaire.
Sauf s'il "rachète" ses années d'études. C'est possible pour chaque année réussie nécessaire à l'obtention du diplôme.
Une loi toute récente permet de valoriser ses études jusqu'au 1er décembre 2020 dans des conditions très avantageuses. Il faut payer 1.500 euros indexés (1.529 euros au taux actuel) par année. Cette somme est fiscalement déductible et donne droit à un supplément de pension, indexé aussi, de quelque 250 euros par an (320 euros au taux ménage) au moment de la retraite. Il ne faut donc pas vivre très longtemps pour amortir son investissement !
Attendre ne fait qu'augmenter la somme à payer, vu l'indexation. Laisser passer la date du 1er décembre 2020 est une très mauvaise idée. Si la régularisation ne se fait pas dans les dix ans suivant la fin des études, la somme à payer sera le résultat d'un calcul actuariel basé sur le moment du paiement est l'espérance de vie. Pour les personnes proches de la retraite, ce sera beaucoup, beaucoup plus cher que 1.529 euros !
ThE
Gare aux retards !
Il est particulièrement important de payer à temps ses cotisations sociales obligatoires en fin d'année. Les caisses perceptrices, y compris celle de l'UCM, sont légalement obligées de majorer les montants impayés de 3 % par trimestre et de 7 % sur le total en fin d'année. Quelques jours de retard peuvent donc entraîner une amende de 10 %. C'est un taux usuraire mais les demandes de réduction formulées par l'UCM n'ont pas (encore ?) été entendues.
Qui plus est, les versements à la pension libre complémentaire ne peuvent être déduits fiscalement que si les cotisations principales ont été payées. Il est donc essentiel d'être vigilant et de tenir compte des délais bancaires. Par prudence, le conseil est de payer au plus tard le 20 décembre.
Pension complémentaire pour les salariés
À côté de la pension légale (1er pilier) organisée par l'État, une pension complémentaire peut être constituée au bénéfice des salariés. C'est un élément de motivation et de fidélisation du personnel.
Afin de constituer ce 2e pilier de pension, des contributions sont versées à un organisme privé, compagnie d'assurances ou fonds de pension. Les cotisations versées par l'employeur sont, sous certaines conditions, déductibles à titre de frais professionnels et ne sont pas imposées dans le chef du travailleur. Elles sont cependant assujetties à une cotisation patronale spéciale de sécurité sociale de 8,86 %, majorée de 1,50 % en cas de pension élevée. Les cotisations versées par le travailleur peuvent entraîner une réduction d'impôt de 30 %.
La pension complémentaire est organisée soit par le secteur, soit par l'employeur lui-même et peut prendre la forme d'un engagement collectif ou individuel. Au terme du contrat, l'organisme de pension peut, au choix du travailleur, payer le montant constitué en une fois (capital unique) ou étaler ce paiement dans le temps (rente). L'argent versé au travailleur ou à ses ayants droits est taxé à un taux de 10 % à 30 % et fait l'objet de retenues au profit de l'Office national des pensions (0 à 2 %) et de l'Inami (3,55 %).
L'engagement collectif et individuel
Le plan collectif de pension complémentaire d'entreprise est applicable à tous leurs travailleurs salariés ou à une catégorie déterminée. Certains secteurs organisent un plan de pension complémentaire sectoriel. Dans ce cas, tous les employeurs relevant de cette branche d'activité doivent y souscrire. Le règlement de pension décrit les règles du plan de pension complémentaire.
L'employeur peut aussi décider d'octroyer un avantage de pension complémentaire uniquement à une personne bien déterminée, peu importe la catégorie de personnel à laquelle elle appartient. Cet engagement de pension, concrétisé dans une convention, ne peut être octroyé que s'il existe déjà dans l'entreprise un régime de pension collectif applicable à tous les travailleurs. Aucun engagement ne peut en outre être proposé au cours des 36 derniers mois qui précèdent la retraite ou la prépension.
DDF
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